14 Nov Le Dinosaulyre
Le Dinosaulyre – suivi de L’Étymosaure
Guillaume Métayer – Illustrations de Djohr – Les Belles Lettres
Dans Le Dinosaulyre suivi de L’Étymosaure , Guillaume Métayer opère un pari audacieux : mêler la poésie ludique à la science des mots et des temps géologiques. Destiné aux enfants — et aux adultes curieux — ce recueil brode autour des dinosaures et des racines grecques/latines, tout en invitant à un véritable jeu de langue. Sous-titré « Poèmes et jeux », il s’affirme comme une œuvre pédagogique et poétique à la fois.
Un livre qui agrandit le lecteur
Métayer fait confiance à son public. Il refuse la simplification artificielle et joue au contraire avec la beauté brute des noms savants. Les enfants y trouvent de longues sonorités qui claquent, les adultes, des clins d’œil érudits. Le poète, également chercheur au CNRS, assume cette double adresse. Son ambition est pédagogique, mais l’écriture reste pleinement poétique.
L’ouvrage se compose de deux parties : la première, Le Dinosaulyre, propose des poèmes ayant pour protagonistes des dinosaures — comme l’« iguanodon » dans le premier texte — et met en scène, avec fantaisie, ces créatures disparues.
La seconde partie, L’Étymosaure, décline une série de jeux et d’exercices : reconnaître des racines latines ou grecques, inventer des noms de dinosaures, choisir des rimes, répondre à des vrais/faux, etc. On y trouve aussi une chronologie des grandes ères géologiques. Cette partie vise explicitement à faire progresser en lecture et en vocabulaire « en s’amusant ».
Le trait bondissant de Djohr
Les illustrations de Djohr, donnent largeur et mouvement aux poèmes. Les silhouettes imposantes s’allègent grâce à un traitement graphique clair et généreux. Les dessins prolongent la cadence. Ils offrent des points d’ancrage, facilitent l’appropriation des termes rares, ouvrent le terrain de jeu.
La seconde partie explicite ce qui était suggéré dans la première. On y trouve jeux de rimes, intrus à débusquer, chronologie des ères, ateliers d’écriture. Cette progression est nette : plaisir immédiat d’un côté, appropriation des mécanismes de l’autre. Métayer y glisse ses compétences de pédagogue tout en gardant un ton enjoué.
Une poétique de l’inventaire enchanté
Le dispositif repose sur un renversement stimulant. Les dinosaures servent d’appuis pour révéler les structures du langage. Les noms, d’ordinaire opaques, deviennent des outils. On observe les préfixes, on manipule les racines, on assemble, on déforme. L’ensemble évoque parfois la liberté oulipienne, mais sans rigidité théorique.
Le balancement entre poésie et cahier didactique entraîne parfois de légères variations de rythme. Certaines pages de jeux paraîtront plus scolaires, certains poèmes plus démonstratifs. Ce léger déséquilibre ne gêne pas la cohérence du projet. C’est un livre hybride, pensé pour circuler entre plaisir et raisonnement.
Pour qui ?
Idéal pour lecteurs autonomes du primaire, classes du CE2 au CM2, médiathèques ou ateliers de langue. Les adultes amateurs de poésie y trouveront aussi leur compte. La lecture à voix haute en révèle la puissance rythmique. Les activités qui suivent prolongent l’expérience, et invitent chacun à inventer ses propres “monstres lexicaux”.
Le Dinosaulyre suivi de L’Étymosaure est un livre qui affranchit la poésie des carcans habituels du « jeunesse » ou de la « grande poésie». Il invente un terrain hybride où les dinosaures deviennent symboles de mots, de temps, de racines latines et grecques, et où le lecteur — enfant ou adulte — est convié à jouer, apprendre, retrouver le plaisir de nommer et de faire raisonner.
Si vous cherchez un ouvrage qui mêle poésie, vocabulaire, jeu, et l’amour des mots, ce recueil est un pari gagnant. Il témoigne que la poésie n’est pas réservée aux seuls initiés mais peut devenir un terrain de jeu, d’invention et de découverte — même quand elle évoque un diplodocus.
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