Vinicius de Moraes, hommage à la poésie du « blanc le plus noir du Brésil »

Je te demande pardon pour t’aimer tout à coup
Vinícius de Moraes – Traduit par Jean Georges Rueff – Editions Seghers – 144 pages

Soudain le rire se figea en pleurs Silencieux et blancs comme la brume Et des bouches scellées jaillit l’écume Et des mains aplaties surgit la frayeur. Soudain le calme se mua en vent Qui des yeux ôtait la dernière flamme Et la passion se fit pressentiment Et de l’immobilité naquit le drame.

Souvent connu comme l’un des « inventeurs » de la Bossa nova, personnage clé de la musique brésilienne contemporaine, diplomate, le « blanc le plus noir du Brésil », selon ses propres mots cités par Pierre Barouh dans la chanson « Saravah » était avant tout un poète.

Celui que l’on surnommait « poetinha », petit poète en portugais, occupe encore aujourd’hui une place singulière dans l’histoire de la poésie brésilienne et lusophone. Ses poèmes, qui suivent de peu le mouvement moderniste brésilien, mêlant écriture claire et langue fluide, alternance de formes fixes (comme le sonnet) et de vers libres, puisent tant dans sa vaste culture littéraire que dans ses expériences intimes tels l’amour perdu, trahi, conquis ou consommé, les amitiés, la solitude, la violence, la pauvreté, l’agitation des villes et la sérénité des champs. Dépêché à Paris dans le cadre de ses fonctions diplomatiques dès 1953, Vinicius de Moraes y fait la rencontre de Pierre Seghers, lequel fait traduire ses poésies et les publie en deux volumes (Cinq élégies puis Recettes de femmes) dans la collection « Autour du monde ». Éternel romantique – il se maria neuf fois -, Vinicius de Moraes y célèbre tout en lyrisme la vie dans ses excès, les femmes qui étaient ses muses et surtout l’amour. Ses poèmes d’amour et élégies, rassemblés en un volume, paraissent aujourd’hui chez Seghers dans une édition bilingue.

Né dans une famille de musiciens le 19 octobre 1913, à Rio de Janeiro, Vinicius de Moraes écrit de la poésie dès l’enfance. Il compose ses premières chansons à l’adolescence et publie deux recueils de poésie, O Caminho Para a Distância et Forma e Exegese, au début des années trente, alors qu’il est encore étudiant en droit. Parallèlement à sa carrière de diplomate, suivront une douzaine d’autres publications, notamment Ariana, a Muhler (1936), Novos Poemas (1938), Poemas, Sonetos e Baladas (1946), Livro de Sonetos (1957). Il écrira plus d’une centaine de chansons, dont certaines deviendront des standards de la Bossa nova et des classiques de la musique brésilienne, ainsi que des pièces de théâtre. Figure incontournable de la culture populaire de son pays, il meurt en 1980 à l’âge de 66 ans.

Ecoutez Vinicius Moraes

Vinicius de Moraes, Maria Creuza et Toquinho

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