
20 Fév Printemps rouge
Printemps Rouge
de Burgier louise Martin (Auteur), Chloé Fraser (Illustrations), Miranda Beshara (Traduction) – Éditions Le Port a jauni
– En librairie le 5 mars –

Éclat de vie ou cri d’alarme ? Printemps rouge de Louise Martin Burgier oscille entre plusieurs teintes d’émotion, entre douceur et violence, entre l’éveil et l’abîme. Ce texte, écrit au lendemain des années Covid, porte la fraîcheur d’une adolescence qui interroge le monde et se confronte à sa complexité. Rouge sang, rouge colère, rouge fleurs du printemps, rouge corps en bas d’une fenêtre : chaque image semble tisser une atmosphère à la fois troublante et lumineuse.
Tout commence lors d’un salon du livre à Sucé-sur-Erdre, près de Nantes, en 2023. La maison d’édition Le Port a jauni intervient dans plusieurs collèges et rencontre une classe particulièrement inspirée. Lors des échanges, Louise Martin Burgier se lève et lit son poème. L’instant suspendu laisse place à un étonnement : ce texte, d’une rare maturité, frappe par sa puissance évocatrice et sa polysémie. Profondément mélancolique certains jours, résolument lumineux à d’autres, Printemps rouge semble capter la vibration intime des émotions.
Séduits par cette voix singulière, les éditeurs décident de relever un défi inédit : publier pour la première fois le poème d’une adolescente. Un choix audacieux, qui témoigne de leur volonté d’explorer toutes les formes d’expression poétique. Mais ce livre ne serait pas complet sans les illustrations envoûtantes de Chloé Fraser. Ses grandes peintures, où dominent des dégradés de rouge, évoquent une nature apaisante et pourtant inquiétante, une quiétude troublée par une tension diffuse. L’image et le texte s’entrelacent, créant une œuvre hybride où l’invisible se devine entre les lignes et les couleurs.
À travers cette publication, Le Port a jauni offre à un texte d’adolescente une portée universelle. Car Printemps rouge parle à tous : à ceux qui doutent, à ceux qui espèrent, à ceux qui contemplent le temps qui passe et les saisons qui reviennent.
Le Port a jauni : l’édition comme pont entre les cultures
Si Printemps rouge témoigne d’un regard neuf sur la poésie, c’est aussi grâce à la maison d’édition qui le porte. Depuis sa création, Le Port a jauni défend une vision singulière du livre : un espace de dialogue entre les langues, un lieu où le français et l’arabe cohabitent en miroir, sans exotisme ni folklore.
Née à Marseille, cette maison d’édition a été fondée par Mathilde Chèvre, animée par une idée simple mais essentielle : permettre à chacun de découvrir l’autre à travers sa langue. Ici, pas de clichés sur le monde arabe, pas d’orientalisme figé. Les livres du Port a jauni proposent des histoires ancrées dans le quotidien, où les cultures se rencontrent naturellement.
L’aventure commence en 2002, sous la forme d’une association publiant des livres pour accompagner des ateliers d’éducation populaire. Mais très vite, le projet prend de l’ampleur. En 2007, un tournant décisif est pris avec la sortie du premier ouvrage bilingue, une réponse à un constat : le français et l’arabe, bien que souvent associés, sont rarement réunis dans un même objet éditorial. Le Port a jauni invente alors un concept ludique et immersif : des livres qui se lisent dans tous les sens. Certains basculent, d’autres fonctionnent comme des palindromes, offrant aux lecteurs une expérience unique où la lecture devient aussi un jeu.
Loin de se limiter aux albums jeunesse, la maison d’édition publie également des œuvres de poésie bilingue, souvent issues du patrimoine littéraire arabe. Parmi elles, on retrouve des classiques intemporels comme les Mu’allaqat, ces poèmes suspendus d’avant l’islam, ou encore les Roubaiyat, ces quatrains empreints d’ironie et de sagesse. Des créations originales voient aussi le jour, enrichies par le regard d’illustrateurs qui travaillent en interaction avec les auteurs.
Mais Le Port a jauni, c’est avant tout une équipe de passionnés qui font vivre ces livres d’une manière unique. Une poignée de collaborateurs et de bénévoles, un choix éthique assumé : imprimer tous les ouvrages à Marseille, proposer des ouvrages accessibles et distribuer des versions sonores en arabe sur leur site, pour que la langue puisse être entendue autant que lue.
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