Mort de Louise Glück : les miroirs de l’âme

© Photo : Backgrid USA / Bestimage

Louise Glück en 2016 alors qu’elle reçoit la National Humanities Medal des mains du président Barack Obama.

Lire Louise Glück

Averno
(176 p., 19 €)
traduit de l’anglais par Marie Olivier, éd. Gallimard.

Meadowlands
(144 p., 16 €),
traduit de l’anglais par Marie Olivier, éd. Gallimard.

Native de New York et considérée comme l’une des plus grandes figures de la poésie américaine, Louise Gluck a été la 16e femme à être couronnée en 2020 par le Prix Nobel de Littérature. Elle nous a quitté en octobre 2023. Deux recueils en édition bilingue, L’iris Sauvage et Nuit de Foi et de Vertu, publiés par Gallimard, vont permettre au lecteur français de se familiariser avec l’œuvre de cette grande poétesse. A découvrir ou redécouvrir.

Reconnue pour ses poèmes qui explorent en profondeur les thèmes de la vie, de la mort, de la famille et de la nature humaine, Louise Glück touche par son style unique, mélange de minimalisme et d’intensité. Son œuvre, un véritable kaléidoscope de sentiments humains, transporte dans un monde où la beauté et la tristesse se côtoient en harmonie. Elle a toujours eu le don de toucher le cœur de ses lecteurs avec une simplicité désarmante et une profondeur saisissante.

« Le plus frappant, chez Louise Glück, c’est la simplicité de sa langue. Elle part de situations quotidiennes très familières, et le poème se met ensuite en place avec une grande complexité psychologique. Même quand il n’y a pas de récit, son travail sur les formes verbales donne envie de continuer à lire » souligne l’universitaire Romain Benini, qui a traduit en français l’un de ses livres.

Son œuvre, commencée en 1968 et riche d’une douzaine de recueils, est reconnue pour son style fluide et sa sublimation de la beauté simple de la nature. L’Iris Sauvage (Prix Pulitzer) et Nuit de Foi et de Vertu, sont considérées comme ses œuvres maitresses.

L’Iris Sauvage, parue en 1992, est souvent citée comme l’une des plus belles œuvres de Louise Glück : il aborde les thèmes de la désolation et de l’absence divine tout en reflétant les questionnements existentiels de la poétesse : quelle signification attribuer à la souffrance et à la mort ? Face à l’inéluctabilité de la souffrance et à la fugacité de la vie, sur quoi l’humain peut-il se reposer pour subsister tant physiquement que spirituellement ? Le livre est agencé à la manière d’un jardin dans lequel les poèmes, bien qu’indépendants, sont étroitement liés les uns aux autres, comme s’ils étaient aménagés dans un paysage. Le dialogue se tient principalement entre le poète et Dieu, tandis que le jardin offre plutôt un point de vue sur la nature incessante du cycle de la création et de la destruction.

Nuit de Foi et de Vertu, publié vingt-deux ans après L’Iris Sauvage, est l’œuvre d’une poétesse septuagénaire dont les thèmes de prédilection sont restés similaires, mais dont la perspective est envisagée comme «face à l’abime ». Le recueil se montre plus direct, plus narratif, plus incarné et plus autobiographique que L’Iris Sauvage. Il s’agit d’un texte d’une force plus marquée, résolument tragique, bien que non dépourvu de légèreté ; il nous entraîne aux côtés d’un personnage qui marque clairement qu’il/elle parle au terme d’un long périple de vie : « après que je suis entrée / dans cette phase de l’existence / que les gens préfèrent mentionner en parlant des autres / plutôt qu’en ce qui concerne eux-mêmes » (extrait de  « Visiteurs venus d’ailleurs » ).

À travers son écriture, Louise Glück a exploré les méandres de l’âme humaine, dévoilant ses vulnérabilités et ses espoirs avec une grâce inégalée. Chacun de ses poèmes est un voyage, une quête de vérité, un miroir reflétant la complexité de la vie et de l’esprit humain.

Ses poèmes, souvent empreints de thèmes personnels et universels, tels que la nature, l’existence, la perte et le désir, le silence de Dieu, résonnent avec une clarté cristalline et une simplicité trompeuses, qui cachent souvent une exploration intense des émotions et des expériences humaines. Les formes poétiques assez courtes (tant pour ce qui est des poèmes que des vers), dans une langue relativement simple, possèdent à la fois les accents de la conversation et de l’oraculaire.

Avec sa plume délicate et puissante, elle nous rappelle que la poésie est un langage universel, une passerelle entre les âmes, un refuge où les mots deviennent lumière. Son héritage littéraire continue d’inspirer et d’éclairer, un phare dans le paysage littéraire mondial.

Pour en savoir plus…

les vertus du Prix Nobel

Par Claude Grimal

Louise Glück : sous le Nobel, la Tora

avec Romain Benini

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