La poésie du goulag

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Le Verbe et le Mirador

Le Verbe et le Mirador. La poésie au goulag. Par Elena Balzamo

Une sorte d’anthologie de témoignages d'écrivains détenus au goulag sur le pouvoir salvateur de la littérature dans les camps soviétiques. Des poèmes poignants qui expriment cette liberté intérieure que peut apporter l'écriture dans les pires conditions de détention. On les doit à de nombreux auteurs inconnus mais aussi à Soljenitsyne condamné à huit ans de goulag pour avoir critiqué la stratégie de Staline.

L’émotion et la révolte suscitées dans le monde entier par la mort d’Alexeï Navalny le 15 février dernier au goulag de Pokrov en Sibérie est indicible. Pourtant, enfermés dans l’obscurité de leur cellule, certains ont trouvé refuge dans la poésie et ces vers murmurés entre les mûrs du goulag leur ont permis de transcender les barrières et de défier l’oppression. Comme une puissante affirmation de la vie, un éclat de lumière dans les ténèbres de l’histoire.

La poésie au goulag, loin des clichés de la littérature classique, trouve ses racines dans un terreau d’adversité et de résilience humaine. Les goulags, ces camps de travail soviétiques où furent déportés des millions de personnes sous le régime stalinien, ne semblent pas, à première vue, des lieux propices à la création artistique. Pourtant, c’est dans ces conditions extrêmes que la poésie a servi de refuge, de résistance et d’expression de l’âme.

Au cœur de l’inhumanité, la poésie a émergé comme un acte de rébellion contre l’oppression, un moyen pour les prisonniers de maintenir leur dignité, de préserver leur identité et de rester connectés à ce qui fait d’eux des êtres humains. Les poèmes écrits au goulag étaient souvent dépourvus de papier et d’encre, gravés dans la mémoire des détenus ou transmis oralement, cachés dans les interstices de la surveillance constante.

Ces œuvres littéraires, marquées par une intensité émotionnelle profonde, traitent de thèmes universels tels que la souffrance, la mort, l’espoir, la solidarité et l’amour. Elles témoignent de l’endurance de l’esprit humain face à l’adversité et de sa capacité à trouver de la beauté et du sens même dans les circonstances les plus sombres. La poésie au goulag est un miroir de l’âme collective de ceux qui ont souffert sous la répression, un testament de leur lutte pour conserver leur humanité dans un monde où elle était constamment niée.

Des figures emblématiques, comme Anna Akhmatova et Ossip Mandelstam, ont laissé des traces indélébiles dans l’histoire de la poésie de cette époque. Leurs écrits, souvent composés dans le secret et à grand risque personnel, circulaient sous le manteau, défiant le régime soviétique en affirmant la liberté de pensée et d’expression. Akhmatova, dans son poème « Requiem », capture l’angoisse des femmes attendant des nouvelles de leurs proches emprisonnés, tandis que Mandelstam, dans ses vers, défie ouvertement la tyrannie de Staline, un acte qui lui coûtera finalement la vie.

La poésie au goulag n’est pas seulement un chapitre de l’histoire littéraire, elle est un phare de l’esprit humain confronté à l’obscurité. Elle rappelle le pouvoir des mots à survivre, consoler, soulager et accepter l’inacceptable.

Prose et poésie d’Ossip Mandelstam

Ossip Mandelstam écrit en 1933 une “Épigramme contre Staline”, qui lui vaut arrestation, exil, et finalement mort durant sa déportation vers la Kolyma.

(France Culture / Répliques)

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