
13 Jan L’araignée pendue à un cil

Dans « L’araignée pendue à un cil », Marie-Paule Berranger tisse une anthologie où la poésie surréaliste féminine prend enfin toute sa lumière. Paru chez Gallimard en 2024, cet ouvrage révèle un éventail saisissant de voix poétiques longtemps étouffées par le récit officiel d’un mouvement surréaliste dominé par des figures masculines. Ici, ce sont 33 poétesses qui surgissent de l’ombre pour réenchanter notre vision du surréalisme.
Le titre, emprunté à une image surréaliste d’une intensité évocatrice, illustre l’essence même de la poésie de ces femmes : un équilibre fragile entre mystère et provocation, entre le rêve et l’inconscient. Ce recueil ne propose pas seulement des mots, mais des visions. Il invite à ressentir ce que la langue peut dévoiler lorsqu’elle s’affranchit des cadres de la logique.
Un labyrinthe d’images et de sensations
La sélection parcourt des formes variées : poèmes éclatés, proses lyriques, aphorismes incisifs et correspondances enflammées. Chaque page résonne comme une brèche ouverte sur des mondes insoupçonnés. Les textes de Claude Cahun, Leonora Carrington, ou encore Joyce Mansour repoussent les limites du langage et jouent avec une syntaxe déroutante, où les mots deviennent matière sonore et visuelle.
Cette poésie est un cri et une caresse, un fil tendu entre l’amour et la révolte. La dimension corporelle y est omniprésente : des métamorphoses étranges se dessinent, les corps sont magnifiés ou désarticulés, les images se lovent autour de sensations intimes et universelles. La plume féminine réinvestit ainsi l’imaginaire, offrant une contre-narration aux fétiches surréalistes souvent cantonnés à des rôles de muses ou de chimères.
Redonner sa place au chant poétique féminin
» L’araignée pendue à un cil » fait résonner la puissance de ces vers souvent méconnus, rappelant que les femmes n’ont jamais été simples observatrices du surréalisme, mais bien des artistes-poètes au cœur du mouvement. Ce recueil souligne combien la poésie était pour elles une arme de réinvention du monde et de soi-même. À travers ces pages, la langue s’émancipe, déploie des rêves à vif, fait danser les ombres pour illuminer l’invisible.
une toile essentielle de la poésie surréaliste
Plus qu’une anthologie, ce livre est une symphonie poétique, un hommage aux artistes qui ont repoussé les frontières du dicible. Il rappelle l’essence même du surréalisme : la liberté absolue, où les mots deviennent peinture, musique et éclats de sensations. « L’araignée pendue à un cil » répare une injustice littéraire et offre aux lecteurs une redécouverte bouleversante d’une poésie qui défie le réel pour nous emmener au-delà du possible.
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